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La Sarthe hivernale en crue

Le 10 février 2019

Avec Mélanie - Gabrielle - Sarah - Gilles (R1) - Jean-Marc - Vincent (rédacteur) - Christophe (dégonflé) ?

Pour faire court...

La Sarthe est une rivière très agréable lorsque les conditions sont optimales (disons entre 1,20 et 1,80 mètres de hauteur d'eau). Les paysages traversés sont magnifiques et ce n'est pas par hasard si un des villages traversés - Saint Céneri le Gérei - est classé parmi les plus beaux villages de France.

Mais lorsque la hauteur d'eau à l'échelle du Moulin du Désert atteint 2,30 m, ça ne rigole pas.

Ce n'est pas tant une question de niveau technique - rarement plus de II - mais en raison des nombreux pièges propres aux rivières en crue, surtout quand elles sont entrecoupées de barrages.

Lorsque ces derniers débordent, on ne les voit pas forcément de loin car ils forment une ligne lisse qui ne se signale par aucun remous. Juste en dessous se forment d'inévitables rappels dont certains peuvent être dangereux. La reconnaissance est indispensable et le contournement parfois de rigueur. La recommandation est valable sur chacun des 6 barrages du parcours entre le Moulin du désert et Saint-Léonard des Bois. Indice : les barrages ont été conçus pour alimenter des moulins, donc dès qu'on aperçoit une construction proche de la berge, méfiance.

L'autre piège, ce sont bien sûr les arbres et branches immergées, nombreux dans une rivière en crue. On sait qu'il faut les éviter, encore faut-il rester vigilant. Il faut l'être aussi vis-à-vis des clôtures en barbelés des prairies immergées.

Et enfin, en temps de crue, les rives sont incertaines et souvent encombrées. Les stops peuvent se faire rares ou peu praticables, rendant la récupération problématique et les bains un peu longuets.

Moralité : par 2,30 m de hauteur d'eau, il vaut mieux bien connaître la rivière et ne pas venir avec n'importe qui.
On s'en doute, toutes ces recommandations cachent quelque chose... à lire dans ce qui suit.

Une décision difficile

Les yeux rivés sur la météo et le site Vigicrues depuis deux mois, Gilles nous envoie le feu vert le vendredi soir : 1.50m. La sortie annoncée disons, comme "peinarde", avec comme objectif "zéro bain" (J'en devine qui rigolent...). Oui, mais voilà, la pluie tombe sur le Perche, pas sur Alençon et la courbe de la hauteur amorce une ascension irrésistible.

Le matin du départ, Gilles, découvre à 6h00 la courbe qui, de "descendante" est maintenant ascendante à 2,10m. Il déclare que la sortie est annulée car elle ne correspond plus du tout à la gentille balade prévue. Le problème est que nous sommes déjà plusieurs sur place à la base, certain(e)s bien déçu(e)s de devoir renoncer.

Après trois quart d'heure de tergiversations et le forfait de Christophe, nous décidons de partir avec le sit-on-top piloté par Gilles pour permettre à Sarah de pouvoir effectuer la sortie sans avoir à se poser de questions. Il est surtout prévu d'effectuer un portage au moindre doute.

D'abord, tout se déroule comme prévu

Après un trajet presque sans repos pour l'essuie-glace, nous découvrons la rivière en crue, à l'eau un peu marronnasse et au courant conséquent, mais encore avenante et pas si impressionnante que la hauteur d'eau pouvait laisser croire.

Vincent effectue une navette d'à peine trois quart d'heure grâce à son vélo électrique. Pour un parcours relativement court - environ 10 km - c'est une solution à retenir car l'engin remonte les côtes à près de 25 km/h.

Jusqu'au premier barrage, juste avant Saint Céneri Le Géréi, c'est un vrai bonheur. La rivière nous entraîne rapidement et sans encombre, avec le ludique train de vague du rapide de Pierre Bécue. Lors d'une éclaircie, j'envisage même d'envoyer une photo de la rivière sous le soleil à Christophe, histoire de le faire bisquer. J'ai bien fait de m'abstenir...

Pour le premier barrage, avant Saint Céneri, nous faisons tout bien comme il faut. Après la reconnaissance de rigueur, Vincent passe en premier afin de confirmer que le passage ne présente pas de difficulté. Deux versions étaient possibles, soit directement par dessus le barrage qui ne rappelait pas, soit plus classiquement par la veine d'eau de gauche qui longe les arbres. Tout le monde est passé sans état d'âme.

Nous franchissons ensuite le barrage de La Bataille un peu encombré d'arbres, avec une certaine confiance pour certains, un portage pour d'autres. Tout va bien.

Le barrage de Moulin de Trotté avec le passage dit du "fauteuil" oblige au portage en raison d'un mouvement d'eau vraiment pas engageant. Par flemme de devoir porter le sit-on-top, aussi par défi, Mélanie et Vincent décident de le passer quand même, avec Gilles en sécurité. Le bateau, 4.5 m, avale l'obstacle avec une telle facilité que ça donnerait presque envie de le passer en kayak de 2 m. Gilles nous en dissuade. Il avait sans doute raison car le rappel nous regardait d'un air sournois.

Puis viennent une série de rapides avec jolis trains de vagues entrecoupés d'averses. On profite de la balade. Le prochain barrage, celui du Moulin du Val est encore loin...

Ça se gâte

Non ! Il n'est pas loin, il est devant nous ! Personne ne l'avait repéré, ni Gilles l'ouvreur, ni Vincent, ni Jean-Marc qui connaissent pourtant bien la rivière. On vous l'a dit : une ligne sans remous qui ne distingue presque pas du reste. Trop tard, tout le monde est fermement invité par la sournoise rivière à bien vouloir goûter de son jus.

Sauf erreur, car tout est allé très vite : d'abord Gilles et Sarah dans le sit-on-top. Gilles a bien vu le moulin sur la gauche, puis seulement après, la ligne d'eau. Il tente d'alerter tout le monde. Le sit-on-top est un kayak sans gîte possible, il n'aime pas qu'un courant de rappel lui passe sous les fesses. Plouf pour tout le monde. Le sit-on-top n'en est pas moins farceur et ne se laisse pas facilement remonter quand il a désarçonné ses cavaliers.

Vincent arrive ensuite, envisage une hypothétique et hasardeuse manœuvre pour aller sauver Gilles et Sarah qui barbotent dans le rappel, hésite, ralentit un peu trop... plouf lui aussi au plus fort du rappel.

La chance, c'est que ce rappel était muni d'une issue de secours, un léger courant qui portait vers l'extérieur. C'est sans doute en rapport avec la configuration du barrage, en biais par rapport au courant principal. Quoiqu'il en soit, cela permit à Gilles, Sarah, Vincent, le sit-on-top et le bateau de s'en extraire... pour être aussitôt entraînés par la rivière qui, bien sûr, n'a que des arbres immergés à proposer en guise de berge dans cette portion.

Et pendant ce temps, les autres ? Mélanie raconte la suite, car j'étais un peu occupé : "Au passage fatidique, Gabrielle juste devant moi a bien compris le signe de Gilles qui lui disait de passer bien sur la droite. Elle a immédiatement orienté correctement son bateau et je l’ai suivie de près. Elle est passée impeccablement sur la langue puis le retour de vague dans le sens de la marche. Mais ensuite au lieu de bifurquer vers la gauche pour reprendre le cours de la rivière et éviter les arbres, elle s’est fait agresser par des branchages". Plouf donc.

Mélanie a déjà deux bateaux à récupérer, elle en choisira un, avec succès semble-t-il. Oui mais voilà, une rivière en crue, se sont surtout des arbres en travers, tous prêts à jouer des mauvais tours... On l'aura compris, après Gilles, Sarah, Vincent, Gabrielle, c'est le cinquième plouf pour Mélanie.

Et Jean-Marc dans tout ça ? Non, lui, il échappera à tous les pièges. Tant mieux, parce qu'il se retrouve seul en tête : "parti à la poursuite du kayak de Vincent embarqué par les flots, il tente désespérément de stopper sa course folle, mais l'absence de contre salvateur l'en empêche. Le courant continu les conduit sans relâche à 800 m en amont de Saint-Léonard, où enfin JM aperçoit sur la droite une zone d'allure plus sereine. Il tente d'y pousser le kayak orphelin, mais ne parvient qu'à le dévier dans des branchages malheureusement quelque peu distants de la rive."

"Il accoste pour surveiller le kayak en cravate en attendant les copains, ne sachant vraiment s'il pourra repartir à temps si celui s'évade. Heureusement les branches ont résisté jusqu'au bout..." (c'est lui qui raconte).

Revenons aux cinq naufragés. Il leur faudra pas loin de 500 mètres de nage plus ou moins chaotique pour que tous puissent se poser sur un coin de berge près d'une route en rive gauche.

Que faire ? Nous avons déjà perdu deux bateaux. A quatre sur le sit-on-top, ce n'est pas raisonnable, sans compter qu'il reste encore deux barrages à franchir. Ça suffit comme ça les activités nautiques, on n'a pas de nouvelles de Jean-MArc, ce n'est plus drôle du tout. Sarah reste à surveiller le matériel. Gilles, Mélanie et Gabrielle partent à pied à la recherche de Jean-Marc. Vincent va chercher le camion en prenant la route.

Jean-Marc échoué un peu plus bas appelle tout le monde avec son portable, y compris Christophe qui aura, à sa façon, un peu participé à la sortie. Inutile de raconter la suite, tout a fini par rentrer dans l'ordre et s'est forcément terminé autour d'un chocolat chaud à Céneri. Sur le trajet du retour, l'essuie-glace a repris du service et le niveau de Vigicrue a annoncé, je crois, un 2,40 m bien tassé.

Il n'aura peut-être pas échappé au lecteur attentif qu'un bateau manque à l'appel. À l'heure où nous publions, le Spy rouge se trouve encore quelque part entre Le Moulin du Val et l'Atlantique. Signe distinctif : il contient les gâteaux du 4h de Gabrielle. Cela suffira-t-il comme récompense à celle ou celui qui nous le retrouvera ?

A ce propos, Sarah demande à ce qu'on rappelle à tous une recommandation utile : ne pas mettre ses papiers persos ni sa paye du mois dans un kayak. On ne sait jamais...

Est-ce qu'on va la refaire cette sortie ? Celle de 2012 avec Vincent Amisse et un niveau d'eau comparable a laissé aussi quelques traces dans les mémoires.

Bien entendu qu'on va la refaire. Mais c'est promis, la prochaine fois, on fera très très attention...

Vincent D

P.-S. NDLR : une mission de recherche, menée par Gilles et Pierre le dimanche suivant, a finalement permis de récupérer le bateau manquant, qui les attendait gentiment coincé dans des branches 7 km après le barrage !

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